Entre Robec et Aubette
Un village lacustre, des jardins, puis plus rien...
Des projets risquant de bouleverser le paysage, le long de la route de Lyons, après la rue Saint- Gilles, posent des questions chez les riverains et les jardiniers occupant les lieux. Mais qu'y avait-il dans les jardins coincés entre le Robec et l’Aubette ? Des marécages.
L’Aubette, allant vers Saint-Paul pour se jeter dans la Seine, passait sous une digue. Sur cette digue, on construisit la chaussée Martainville, actuelle rue du Faubourg Martainville, pour atteindre, aux pieds de la Côte Sainte-Catherine, la route de Paris. Par la suite, on détourna l’Aubette pour la faire entrer dans la ville et faire tourner le moulin de Martainville. Une ouverture, au niveau des remparts, permettait d’alimenter les fossés.
L'Aubette désolée en 2002
Dans cet immense espace, s’étalait une vaste étendue d’eau, servant de vivier dit de "Martainville". Cheminant péniblement vers la Seine, deux ruisseaux alimentaient cette zone marécageuse, qui servait de protection naturelle pour l’Est de Rouen : la CLERETTE, issue d’une source "aux clercs, au nord de l’ancienne rue Cat Rouge" et le ruisseau de "l’égout des Fontaines", dont la source se trouvait près de Saint-Hilaire.
Peu à peu, les marais se comblent, les terres deviennent plus solides. Avant la Révolution, les prés couvrent l’espace et sont transformés en jardins. Un vivier existait aussi près de la Chartreuse de la Rose. Le journaliste et collectionneur rouennais THAURIN, observe en 1865 la plantation de pieux destinés à soutenir la future gare de Martainville, maintenant rasée. Il note une profondeur de 7 à 8 mètres entre le niveau du sol et les fonds solides, constitués ainsi :2 m 50 de terre brunâtre humide, puis 80 cm de tourbe naturelle excellente, composée de débris de roseaux et de mousses, puis 3 m de vase sans consistance très délayée par les sources , enfin un gravier compact d’1 m 50. Dans ce gravier, on trouve les traces de chênes, de hêtres, bouleaux, trembles et aulnes, les restes d’antiques buissons d’épines noires , blanches et noisetiers, dont les fruits étaient encore entiers. Il y a aussi des restes de coquillages, bœufs, chevaux, sangliers, porcs, cerfs, chevreuils, loups et d’un chien de grande taille. Et surtout, des pieux de grandes dimensions, dont la pointe était durcie par le feu, preuve de l’existence en ce lieu d’une habitation lacustre, pêcheurs ou jardiniers ?
© Copyright Dominique SAMSON - Juin 1998